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Ce dimanche, les électeurs devront choisir… : Un premier tour vert et ouvert !

Ce dimanche, les électeurs devront choisir… : Un premier tour vert et ouvert !

Ce dimanche, environ 60 000 Orléanais seront appelés aux urnes pour le premier tour des élections municipales. L’affaire s’annonce serrée et, dans un climat d’attaques larvées et de vraies-fausses coalitions en vue du second tour, difficile de savoir qui remportera la timbale. Évaluation de la situation et retour sur une campagne unique.
Benjamin Vasset
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Il y a un gros mois, le sondage publié par La Tribune HebdO et France Bleu Orléans livrait plusieurs messages : d’une, cette « photographie à l’instant T » laissait entrevoir un avantage certain, sur le moment, à Serge Grouard, crédité de 32 % des intentions de vote. Deuxième leçon : une triangulaire au second tour, avec pour autres compagnons de route Olivier Carré (24 % des intentions de vote) et Jean-Philippe Grand (22 %) paraissait plus qu’envisageable, même si nous précisions aussi les marges d’erreur de cette consultation (+ ou – 5%). 

Mais ça, c’était il y a un mois : depuis, quelques grains de sable – à moins que ce ne soient de gros galets – sont venus nourrir la réflexion. D’abord, Olivier Carré, bien que toujours présumé innocent, a été entendu par la police judiciaire d’Orléans sur le délicat sujet de ses notes de frais : cet « événement » n’avait pas été porté à la connaissance des personnes interrogées au moment de leurs entretiens avec les agents de l’Ipsos. Ensuite, les Insoumis et les Animalistes n’ont finalement pu présenter de liste, pour cause de boulettes administratives. Enfin, ces derniers jours, les rumeurs d’alliance entre Olivier Carré et Jean-Philippe Grand dans l’optique d’un second tour ont fait florès et ont troublé le jeu : le maire sortant et le candidat écolo accusent d’ailleurs le camp Grouard d’avoir alimenté ce bruit. Mais pour expliquer la propagation de ce dernier, une autre théorie a également émergé : l’hypothèse de cette alliance Grand / Carré a commencé à être étalée sur la place publique le soir-même du retrait des Insoumis. Or, cet attelage, certes démenti par les deux intéressés – pourrait être vu comme un vrai repoussoir pour les électeurs Insoumis, déjà assez réticents à l’idée de se jeter dans les bras de la seule liste « OSE ». Si au second tour, voter « JPG » voulait dire en plus voter pour un Olivier Carré soutenu par La République en Marche – qu’ils exècrent au plus haut point – quel reniement pour eux ! 

« qui est le plus « écologiste » ? »

Alors, à qui profiterait cette « fuite » plus ou moins organisée ? Certainement à la liste « Faire Respirer Orléans », de Baptiste Chapuis et Dominique Tripet qui, en récupérant plus de voix Insoumises, pourraient imaginer passer la barre des 10 % au soir du premier tour, et être en position de rejoindre le second… Ils seraient alors en mesure de peser sur une éventuelle union des listes dites « de gauche ». 

Jean-Philippe Grand, l’écologie au pouvoir ?

Tordue, la politique locale ? Attendez pour voir. Rappelons-nous les quelques mois qui ont précédé pour bien comprendre que cette campagne des municipales à Orléans aura, quoi qu’il arrive, été historique : deux listes issues d’une même majorité sortante qui se font la guerre depuis six mois en plein conseil municipal ; des haines recuites et des frustrations tenaces qui font que certains se traitent, en off, de gentils noms d’oiseaux… Malgré l’appel public à la modération entre ceux qui se sont aimés et qui aujourd’hui se détestent tant, les couteaux ont bel et bien été tirés. Chez les uns et les autres, on emprunte d’ailleurs l’image d’une « guerre napoléonienne » pour qualifier cette élection, et cela dit en creux qu’il y aura des morts à la fin de cette bataille fratricide. Cependant, à force d’être obnubilé l’un par l’autre, Serge Grouard et Olivier Carré ne risquent-ils pas d’être débordés, in fine, par Jean-Philippe Grand ? 

Premier à se déclarer et parti très tôt, le candidat écologiste arbore autour du cou une couleur, le vert, qui surfe sur des vents porteurs : les Français – et les Orléanais – commencent à peine à se rendre compte que le changement climatique n’est pas qu’une prédiction nébuleuse de soixante-huitards en sandales. Les canicules de l’été dernier ont agi pour beaucoup comme un puissant révélateur : s’ils ne veulent pas cuire à l’étouffée d’ici à 30 ans, ils commencent à comprendre qu’il serait temps que les choses changent, mais si possible sans payer un sou de plus, ni connaître de désagrément supplémentaire dans leur vie de tous les jours. Une vraie quadrature du cercle, que Jean-Philippe Grand veut résoudre sans brusquer les habitudes de ses concitoyens. Il l’a redit à plusieurs reprises : il n’est pas pour « une écologie punitive », ne mettra donc pas des chaînes aux voitures et ne les interdira pas de circuler en centre-ville… Cette version soft de la transition écologique lui est reprochée par certains écolos plus à gauche que lui, qui pensent que sa batterie de propositions sur le sujet (gratuité des transports jusqu’à 26 ans etc.) ne va pas assez loin. Cependant, cette liste « OSE », dont l’acronyme a été fort bien choisi, est clairement le grand outsider de cette élection, malgré le fait que certains électeurs aient encore du mal à identifier son chef. Le déficit de notoriété de Jean-Philippe Grand n’est pas tout à fait comblé par les noms de ses colistiers, pour la plupart assez peu connus du grand public. Mais comme tous les autres candidats, « JPG » dit vouloir renouveler. Or, certains argueront qu’en s’alliant en janvier au mouvement « Orléans Ensemble » de Philippe Rabier, le candidat écologiste a, comme les autres, cédé aux sirènes de la politicaillerie. À moins que ce ne soit qu’une des faces (immergées) de la (real)politique…  

« l’un a succédé à l’autre, mais aujourd’hui, olivier carré et serge grouard sont très clairement… l’un face à l’autre »

Parmi les candidats déclarés à ce premier tour, Jean-Philippe Grand n’est pas le seul à faire de « l’environnement » sa priorité. Il y a notamment Serge Grouard, qui se présente ostensiblement comme « le candidat vert » d’Orléans. On ne peut pas reprocher à l’ancien maire de n’avoir pas labouré ce terrain (d’idées) : depuis son élection de 2014, il n’a cessé de parler d’urgence écologique, évoquant presque la fin du monde si jamais des mesures fortes n’étaient pas prises à tous les niveaux de responsabilité, à commencer par celui de la commune.

Serge Grouard, retour en majesté

De mesures fortes, le candidat soutenu par la LR (dont il a obtenu l’investiture après être passé au-dessus d’Olivier Geffroy, le président des Républicains dans le Loiret), n’en manque pas dans son programme, à tel point que certains de ses adversaires lui reprochent de marcher sur les plates-bandes du Rassemblement National, grand absent de l’élection. Signature d’une charte de la laïcité contre le versement de subventions, coup de poing sur la table pour lutter contre l’immigration clandestine, combat contre l’insécurité, présentée comme une autre « urgence »… : Serge Grouard est en partie revenu, dans son programme, à certains fondamentaux de la droite, dont les valeurs sont bien implantées à Orléans. Les habitants sont inquiets ? Serge Grouard leur apporte des réponses simples et « concrètes », comme il aime à le dire. Redoutable stratège politique, il a su voir le premier ce sur quoi les Orléanais demanderaient des gages. Ses faiblesses ? Le fait d’avoir parfois occulté certains éléments de réponse attendus, comme sur le sujet de la présidence de la Métropole (voir notre édition de la semaine dernière), ou bien d’avoir encore dit en 2015, lors de sa démission pour raisons de santé, qu’il ne reviendrait pas aux manettes. Il le sait, et rabâche d’ailleurs depuis des mois qu’il ne repart que parce que ses amis lui ont demandé ; et qu’il a choisi de se présenter car la situation – et notamment la gestion d’Olivier Carré – l’y obligeait. Les Orléanais le croiront-ils ? Lui tiendront-ils rigueur de sa volte-face ? Auront-ils finalement envie de voir revenir l’homme qui a « embelli la ville » au début du XXIe siècle ? Ces inconnues font partie
de l’équation. 

Olivier Carré, tout allait si bien…

Face à lui, donc, Olivier Carré, maire (et président de la Métropole) sortant. Il y a un an, des observateurs pensaient qu’il serait élu dans un fauteuil en mars 2020. Plus rond que son prédécesseur, il avait su débloquer quelques dossiers au point mort, comme celui de la rue des Carmes ou de l’université en centre-ville. Sa gouvernance, qualifiée « d’apaisée », était saluée, et ce même par ses adversaires politiques. Il y a un an, il s’était aussi dépêtré de l’étiquette LR qui, à l’époque déjà, n’était pas spécialement facile à porter sur le plan national. Dans la campagne des européennes, Olivier Carré avait clairement affiché son rapprochement avec LaREM, et le score de ces élections à Orléans (plus de 25 % pour la liste des Marcheurs) l’avait certainement conforté dans son choix d’avoir joué le bon cheval. Mais les ennuis, pour ne pas dire plus, ont alors commencé à voler en escadrille pour le maire d’Orléans : début de fronde d’une partie de sa majorité municipale sur le dossier des transports urbains et puis, surtout, révélation, par Le Canard Enchaîné, de quelques notes de frais portant interrogations. Se faire épingler par le volatile n’est jamais très bon, d’autant qu’Olivier Carré fut alors présenté comme un élu dépensier, confondant supposément le portefeuille de la mairie avec le sien. Certes raccourci, c’est le message qu’une partie de la population a retenu, quand bien même le maire s’est défendu de toutes ses forces, cinglant des attaques « personnelles » venant de son propre camp, et décidant de publier tous ses frais de déplacement sur le site internet de la Ville. Transparence, en voulais-tu ? Tu en avais ! Mais trop tard, le mal était fait, d’autant qu’en septembre 2019, une lettre anonyme courageusement envoyée par un corbeau en robe d’inquisiteur incitait le Parquet à ouvrir une enquête préliminaire le concernant. 

En privé, Olivier Carré a parfois admis s’être éloigné un peu trop du terrain et de l’hôtel de ville au début de l’année 2018. Une partie de son entourage l’avait alors alerté sur cette problématique. Mais la nature ayant horreur du vide, celui-ci a été comblé par quelques-uns de ses « amis » qui l’attendaient au tournant depuis sa prise de pouvoir en 2015. Le prince avait été adoubé par le roi ? Peut-être, mais il n’était pas le roi. Certains n’ont pas oublié de le rappeler cruellement à Olivier Carré, expliquant pour se justifier qu’ils s’éloignaient de lui parce que sa gouvernance était, selon eux, devenue solitaire. Si l’intéressé a démenti avec force, encore, il n’a visiblement pas vu assez vite que le ver était dans le fruit. 

« la variable covid-19 pèsera-t-elle sur la participation ? »

Dimanche, il présentera un programme et un projet modérés, presque mâtiné « d’identité heureuse », comme aurait dit Alain Juppé en 2016, lors de la primaire de droite et du centre. Olivier Carré répète cependant à l’envi n’avoir peur que d’une chose : qu’Orléans soit déclassée si elle ne prend pas le train du progrès et de l’attractivité. C’est l’un des dadas de cet ancien chef d’entreprise, auquel une partie du tissu économique a d’ailleurs ostensiblement apporté son soutien. Modéré sur le fond, Olivier Carré l’est aussi sur la forme : même s’il a musclé son discours depuis un mois à l’encontre de Serge Grouard dans ses sorties publiques, il n’a pas la même faconde, ni le même côté séducteur que son ancien ami politique. Ce n’est pas toujours une qualité dans une campagne. « Il passe parfois pour un techno alors que c’est lui, de loin, qui est le plus à l’écoute des gens », soupire-t-on toutefois dans son équipe. 

Nathalie Kerrien, le facteur X 

L’écoute, l’ancienne adjointe à la Culture, Nathalie Kerrien, a dit en avoir fait preuve durant toute cette campagne. Elle affirme aussi avoir eu beaucoup moins de moyens que les « autres » candidats, et que le fait d’être une femme lui a occasionné quelques bâtons dans ses roues. Reste aussi que son positionnement pose question : l’espace « centriste » qu’elle veut remplir est déjà plus ou moins pris sur sa droite par Olivier Carré et sur sa gauche par Jean-Philippe Grand. Particulièrement remonté contre le maire sortant, Nathalie Kerrien a agrégé dans son premier cercle des profils qui fourbissent une vraie rancœur envers Olivier Carré, mais dont les profils politiques ne sont pas tout à fait identiques ; on parle là, par exemple, de Yann Chaillou (ex-PS) ou de Laurent Lhomme (UDI). Mais enfin, dans cette liste sobrement intitulée « Nous, elle, Orléans », on explique volontiers que rappeler les étiquettes politiques, c’est n’avoir pas changé de logiciel. 

Cependant, le camp Carré est persuadé que Nathalie Kerrien va s’allier au second tour avec Serge Grouard, duquel elle est très proche. L’intéressée, elle, martèle qu’il n’y aura pas d’alliance, que ces hypothèses sont des racontars relayés par certains Marcheurs avec qui elle s’est brouillée, et qu’elle ira, sabre au clair, jusqu’au bout. Sa liste et son programme ont mis du temps à émerger, ce qui n’a pas facilité la diffusion de son message, mais son projet est là, qui présente quelques idées intéressantes, malignes et aptes à frapper l’électeur indécis. De plus, Nathalie Kerrien a fréquenté les milieux culturels pendant cinq ans, et cela a renforcé sa légitimité à travers ces réseaux qui pèsent plus qu’on ne le pense. Le visage de cette ancienne journaliste télé est aussi plus connu que celui de Jean-Philippe Grand (voir notre sondage du 13 février), ce qui est un atout lors d’un vote où certains électeurs se basent au moins autant sur des idées que sur la bobine de la tête de liste. On exagère un peu, évidemment, mais on n’est pas si loin de la réalité.

« Quoi qu’il arrive dimanche, cette campagne aura été historique à plus d’un titre »

Quel poids pour Baptiste Chapuis ?

Enfin, parmi les candidats à ce premier tour, reste le tandem emmené par Baptiste Chapuis (PS) et Dominique Tripet (PC). À l’automne, cet alliage a été présenté comme « historique » par les deux parti(e)s, quand bien même les Verts en aient été exclus. La faute à qui ? Entre Jean-Philippe Grand et Baptiste Chapuis, chacun s’est, la main sur le cœur, renvoyé la balle. On ne saura sans doute jamais le fin mot de cette querelle ; on a même dit, à l’époque, que l’ancien maire d’Orléans, Jean-Pierre Sueur, avait contribué à cette division. Cela ne lui avait d’ailleurs pas plu, et il avait pris son téléphone pour nous affirmer le contraire… Quoi qu’il en soit, le rassemblement de deux partis – PS et PC – eux aussi « historiques » n’a pas été apprécié chez tous leurs militants, notamment chez les communistes. Chez les socialistes, certains ont rendu leurs cartes il y a quelques jours, notamment Corinne Leveleux-Teixeira, qui n’a pas mâché ses mots envers ses anciens « copains » orléanais. Sur le fond, le programme de « Faire respirer Orléans » n’est pas fondamentalement différent de celui de Jean-Philippe Grand, à ceci près que le PC y a apporté une touche un peu plus sociale, notamment en ce qui concerne la lutte contre la précarité (énergétique) et les violences faites aux femmes. 

Dernière candidate : la liste de Lutte Ouvrière, inamovible et droite dans son anticapitalisme, qui fera comme toujours ses 1,5 % auprès de ses fidèles et qui a choisi de décliner un programme national dans cette élection locale. Organisée comme un corps de force spéciale qui ne sortirait du bois qu’au moment des élections, Lutte Ouvrière n’a eu aucun mal à former une liste. Ce qui en dit long, aussi, sur le système de démocratie représentative à la française, quand on sait que ni la LFI, ni le RN, ne seront eux en mesure de présenter une liste ce dimanche. Un dimanche où l’on espère que la variable « Covid-19 » ne jouera pas un trop grand rôle et n’incitera pas quelques électeurs supplémentaires à rester chez eux. Dans le landernau politique local, on en est même à penser que ce contexte pourrait défavoriser Serge Grouard, très apprécié des séniors, et que la crainte du virus pourrait inciter à rester chez eux… En tout cas, ce premier tour s’annonce passionnant : on a hâte d’y être !

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