Il y a près de cinq ans, en octobre 2017, neuf personnes étaient arrêtées à la suite de la saisie spectaculaire de 1 139 kg de cannabis et de 800 g de cocaïne dans un pavillon de Darvoy. Lors de leur procès, les accusés écopèrent de lourdes peines allant de 4 à 10 ans de prison et d’amendes qui s’élevèrent jusqu’à 500 000 €. Un homme manquait cependant au tableau : Miloud T., suspecté d’être le chef de la bande. Il était en effet avéré que ce dernier connaissait bien Najib B., condamné en 2019. La filature menée par les enquêteurs montra d’ailleurs que les deux hommes s’étaient rencontrés à plusieurs reprises. Mais selon Miloud T., ces rencontres n’avaient pas d’autre objet que l’achat de cannabis pour sa consommation personnelle… À l’automne 2017, à la veille du coup de filet orchestré par la police, Miloud T. s’envola cependant pour le Maroc, dans le but, dit-il plus tard, de célébrer le mariage de son cousin. Un pur hasard ? À cette époque, l’état de santé de son bébé, né prématurément peu de temps avant, était pourtant préoccupant. Ce qui ne l’empêcha pas son père de rester finalement au Maroc pendant… cinq longues années ! À la barre du tribunal d’Orléans, mardi dernier, Miloud T. expliqua qu’il apprit, lors de son séjour au Maghreb, que la police française le soupçonnait d’être à la tête d’un vaste trafic de cannabis, qu’elle était venue chez lui et que ses comptes avaient été bloqués. « J’ai pris peur, j’ai attendu que ça se tasse », raconta-t-il devant le Tribunal. D’autant que le retour des policiers, six mois et un an plus tard chez sa mère, où vivaient sa femme et son fils, le plongea selon lui « dans la panique ». Il passa donc cinq ans au Maroc à aider son grand-père « à la récolte de blé et de tomates ». Durant ce laps de temps, sa famille orléanaise lui rendit visite : un deuxième enfant, aujourd’hui âgé de 4 ans, naquit d’ailleurs pendant cette période.
« On invente une histoire »
Mais en mars 2022, parce que sa famille lui « manquait », Miloud T. se décida à revenir en France. Preuve selon lui de sa bonne foi, il se présenta de lui-même à la police. Celle-ci l’informa qu’il n’y avait pas de mandat d’arrêt contre lui et que, s’il voulait récupérer son argent bloqué – soit plus de 16 000 € – il devait en faire la demande… au Tribunal. Miloud T. s’exécuta mais une semaine plus tard, les policiers l’interpellèrent. Depuis le 10 mai dernier, il est sous mandat de dépôt.
Devant le Tribunal, son avocat a mis en avant la volonté de son client de vouloir rentrer en France. La défense a aussi tenté de démontrer que pour un trafiquant de drogue présumé, les signes extérieurs de richesse de Miloud T. étaient faibles : 410 €, 15 650 dirhams, 100 g de cannabis et une montre de modeste valeur avaient ainsi été saisies à son domicile. À cela s’ajoutaient les quelque 16 000 € de son compte bancaire, que le prévenu justifia par des économies réalisées entre 2014 à 2017 grâce aux ASSEDIC, au RSA qu’il touchait, et par quelques salaires de chauffeur livreur. Quant aux 50 000 € que Miloud T. aurait gagnés au Maroc, cette somme semblait tout à fait raisonnable au regard de l’absence de dépenses. « Il n’y a rien dans ce dossier, c’est pourquoi on invente une histoire », affirma l’avocat, qui ne fut pas suivi par le Tribunal : Miloud T. a été condamné à deux ans de prison ferme.