La séquence est glaçante, difficilement supportable à visionner jusqu’à son terme. Il y a quelques jours, au lendemain du meurtre horrible de la petite Lola, Cyril Hanouna, l’un des animateurs vedettes de la télévision, s’emporte contre les règles les plus élémentaires de l’état de droit, demandant notamment que la meurtrière présumée soit jugée sans délai et condamnée « à la perpétuité directe ». Pendant de longues minutes, à une heure de (trop) grande écoute, Cyril Hanouna déverse une logorrhée absolument stupéfiante qu’on croirait tout droit sortie d’un ballon de pastis servi sans eau ni glaçons au PMU du coin. Que les habitués du comptoir se fassent plaisir entre deux Ricard est une chose ; qu’un animateur connu et écouté par des millions de personnes puisse s’autoriser un discours aussi pitoyable en est une autre, car il sert le fantasme d’une Justice trop laxiste et alimente les « thèses » selon lesquelles il n’y aurait finalement besoin ni de beaucoup de preuves, ni de beaucoup de temps pour envoyer quelqu’un au mitard. Justice doit être rendue pour ce meurtre abominable, mais selon les règles de la République.
On savait déjà qu’Hanouna, l’un des derniers survivants de la télé putassière des années 90-2000, était un démago aux poches remplies de pognon et d’ego ; on ignorait que son cynisme – dire n’importe quoi pour faire parler de soi – pouvait aller jusqu’à flatter aussi grossièrement l’extrémisme le plus crasse. En ces temps troublés où, à travers le monde, le populisme revient aux plus hauts sommets de l’État (Italie) ou a été proche de s’y maintenir (Brésil), il n’est jamais rassurant de voir un pitre ayant de l’audience expliquer très sérieusement qu’une condamnation vaut mieux qu’un jugement. Maintenant, pour éviter que ce melon d’or de la clownerie ne se présente comme un martyr de la « bien-pensance », c’est au spectateur, davantage qu’au régulateur, de prononcer la seule peine qui vaille à ce genre d’énergumènes : le zapper pour de bon.