Même s’ils se font rares sur la tête de Zinedine Zidane, on ne touche pas à un cheveu de l’icône. Pour avoir déclaré publiquement, comme s’il était accoudé au bar, qu’il n’en avait « rien à secouer » des choix de carrière de « Zizou », le président de la Fédération française de football a dû affronter une tempête politico-médiatique qui l’a contraint à prendre un peu de distance. C’est donc pour ce simple mot à l’égard de la « légende », davantage que pour son comportement vis-à-vis des femmes et pour son silence par rapport à des problèmes autrement plus graves (on parle d’agressions sexuelles sur mineurs qui auraient été dissimulées par des cadres de la fédération), que Noël Le Graët est donc tombé.
Comprenons-nous bien : cet homme, qui s’est accroché depuis trop longtemps au pouvoir comme une moule à son rocher, aurait dû depuis longtemps être éjecté de son trône, ou s’en éjecter lui-même. Mais que la fin d’une vie n’oblitère pas le reste : à une époque désormais lointaine, Noël Le Graët fut un dirigeant autrement courageux, lorsque, à la tête de la Ligue nationale de football, il s’est notamment opposé aux magouilles de Bernard Tapie au milieu des années 90. Mais ce combat a vécu, et cela fait désormais longtemps que son âge et l’usure du pouvoir ont fait passer le président de FFF pour un oncle trop encombrant. Cela étant, comment ne pas s’agacer des rodomontades hystériques de la médiacratie sportive qui, sans recul et sans nuances, a réclamé sa tête au nom du tribunal de l’opinion populaire ? La semaine dernière, en écoutant dans le poste des diatribes extrêmement violentes tenues sur les ondes d’une station qui fut autrefois affublée du sobriquet de Radio-Poissonnerie – RMC pour ne pas la citer –, on se demanda bien combien de meurtres Noël Le Graët avait donc commis pour être ainsi brûlé sur la place publique. En écornant un statut, il avait juste touché à une statue. Quand les veaux d’or sont menacés, les moutons de Panurge sont toujours là pour aboyer.