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Fin de vie : « donner la mort ne fait pas partie de notre métier »

Fin de vie : « donner la mort ne fait pas partie de notre métier »

À l’heure où Emmanuel Macron se saisit dossier de la fin de vie et souhaite lancer une convention citoyenne sur le sujet, les professionnels des soins palliatifs s’interrogent sur le débat sociétal qui s’ouvre. Et ils se montrent très clairs sur les chemins qu’ils veulent ne pas prendre.
Anaïs Rambaud
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Le sujet est à prendre avec des pincettes. Il fait sourire ou grincer des dents, et remue un peu les services de santé. Une potentielle future loi autorisant l’euthanasie en France a été évoquée début septembre par Emmanuel Macron et fait couler depuis beaucoup d’encre. Est ainsi évoquée « une aide active à mourir » – pour certains cas et sous certaines conditions – quand la loi Claeys-Leonetti (lire encadré), votée en 2016, « ne suffirait pas », constate d’ailleurs Tony-Marc Camus, président du Réseau régional de soins palliatifs de la Région Centre-Val de Loire.

« Faire mourir ne relève pas des soignants »

Le débat qui s’ouvre actuellement sur l’intégration de l’euthanasie à la législation fait un effet de chamboule-tout ou, en tout cas, de profond malaise dans la profession. « On accompagne la fin de vie à la limite, mais on ne donne pas la mort, insiste Laurent de Loynes de Fumichon, médecin référent de l’équipe mobile de soins palliatifs et d’accompagnement à l’hôpital d’Orléans. Légiférer, c’est ouvrir la boite de Pandore. » Les professionnels évoquent de nombreux amalgames entre des souffrances psychologiques et des pathologies douloureuses. « Les demandes d’euthanasie sont surtout faites par des patients qui se sentent isolés et comme un poids pour leur entourage, poursuit-il. Ces patients vivent alors un grand moment de fragilité. Plus on isole les gens, plus ils ont envie de mourir. Il faut plutôt se concentrer sur leur réintégration dans la société. » Pour Tony-Marc Camus, le président du Réseau régional de soins palliatifs de la Région Centre-Val de Loire, « il existe déjà un arsenal juridique avec la loi Claeys-Leonetti et il serait dangereux de l’ouvrir davantage. Même si cette législation déjà en vigueur est méconnue et pas appliquée ».

À quelques jours de la Journée mondiale des soins palliatifs, qui se déroule le 6 octobre, le fait de légiférer sur le sujet de l’euthanasie crée de réelles angoisses dans le milieu médical. La question qui se lit sur toutes les lèvres reste celle-ci : « Qui va être chargé de faire ça ? » À écouter les témoignages de responsables de service ou des têtes des réseaux régionaux, la réponse semble être quasi-unanime. Les soignants, toutes spécialités confondues, détournent le regard. « Donner la mort ne fait partie de notre métier », évoque le docteur Véronica Rigondet, médecin de l’équipe Mobile de Soins Palliatifs du CH de Bourges et de l’équipe d’Appui Départementale de Soins Palliatifs du Cher. « Le propre du soignant, c’est de faire un soin. Et mourir n’est pas un soin, souligne à son tour Laurent de Loynes de Fumichon. Et donc le fait de faire mourir ne relève pas des soignants. »

Soins palliatifs :  12 lits dédiés à l’hôpital d’Orléans

En première ligne – bien qu’aucun service n’ait, pour l’heure, été désigné comme plus concerné que les autres sur ce débat de la fin de vie –, les soins palliatifs ont sinon pour mission d’intervenir en soutien des autres services de santé, « là où les douleurs sont réfractaires et quand les traitements donnés par les autres médecins ne sont pas efficaces sur le patient, indique Emmanuelle Noireau, médecin de l’Équipe d’Appui Départementale de Soins Palliatifs du Loiret. Nous sommes alors en mesure de proposer des alternatives thérapeutiques ». Contrairement à ce que le commun des mortels peut penser, être admis en unité de soins palliatifs ne signifie pas vivre ses dernières heures : il s’agit plutôt « de faire en sorte de gérer mieux la douleur et la maladie pour se réinsérer ensuite dans son lieu de vie habituel, poursuit Emmanuelle Noireau. Ce n’est pas non plus la même chose qu’un centre anti-
douleur, puisque les soins palliatifs ne concernent pas les patients atteints de maladies chroniques, mais plutôt ceux qui subissent des maladies évolutives engendrant de profondes douleurs et donc des handicaps ».

Dans le Loiret, on fait des comptes d’apothicaire sur les effectifs. Il y a les équipes mobiles, intra et extrahospitalière, de ressources, etc. « Le personnel va en soutien des autres services dans une posture pédagogique pour accompagner les collègues, prendre des décisions quant à des traitements, organiser des staffs pour optimiser le projet de soin du patient », explique Laurent de Loynes de Fumichon, médecin référent de l’équipe mobile de soins palliatifs et d’accompagnement à l’hôpital d’Orléans. Puis, quand le patient doit être suivi intensivement, il rejoint les lits dédiés aux soins palliatifs. Ceux-ci sont au nombre de douze au sein de l’unité de recours des soins palliatifs au Centre Régional Hospitalier d’Orléans. Avec un taux d’occupation estimé en moyenne de 85 à 95 %, ces lits sont « réservés aux cas les plus complexes », précise Tony-Marc Camus, ajoutant également que « davantage de lits ne sont pas requis dans l’immédiat, car nous n’avons assez de personnel pour s’en occuper ». Les praticiens orléanais ne s’estiment pas non plus si mal lotis quand leurs collègues de Bourges réclament une unité de quelques lits depuis 2015, mais sans succès…

Une réponse

  1. Je suis atteint de SLA, marche encore mais avec difficulté, et ne suis aucunement « isolé  » socialement, bien au contraire. Ma femme m’assiste en permanence et nous avons une relation forte, amoureuse et intellectuelle. Mes enfants me soutiennent énormément et eux aussi m’aident à tenir. De nombreux amis passent me voir pour discuter très régulièrement, m’emmènent au cinéma, dans la nature, etc… Je suis très bien entouré. Or, je ne souhaite pas subir les conséquences terribles de la SLA, ni devenir totalement dépendant de personnels médicaux et de ma compagne pour les soins, la toilette et le reste. Je ne souhaite pas que l’on me drogue pour ne pas souffrir physiquement et moralement. Je suis propriétaire de mon corps et je demande « désespérément » à pouvoir bénéficier d’un suicide assisté dès que ma situation deviendra insupportable pour moi. Trop de groupes d’intérêt, religieux, politiques, philosophiques, et médicaux font la pluie et le beau temps en ce domaine. Place aux malades, place à celles où ceux qui souffrent, qu’enfin on les entende …

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