Montoire-sur-Le-Loir, Châteaudun, Brou, Azé, Naveil, Bonneval, Vendôme… Lors du deuxième confinement de novembre dernier, ces communes de la région Centre-Val de Loire avaient « frondé » la fermeture des commerces jugés non-essentiels, en prenant des arrêtés autorisant le maintien de leur ouverture. Des arrêtés qui furent ensuite retoqués par les préfets de départements, lesquels saisirent alors le Tribunal administratif.
Lundi matin, à Orléans, point d’édiles ni d’avocats n’étaient présents pour défendre les maires frondeurs ; la rapporteure publique conduisit plutôt une longue lecture argumentée. Celle-ci rappela l’état d’urgence qui avait cours en novembre, ainsi que les mesures prises par le Gouvernement au moment des faits. Dans ces différentes affaires, l’argumentation des maires était la même, à quelques différences près : ils avaient expliqué, comme à Bonneval, Naveil ou Châteaudun, avoir pris « cet arrêté face à des pratiques déloyales, car les rayons non-alimentaires des grandes surfaces n’étaient pas fermés », convoquant « le respect de l’égalité » quelques jours plus tard. Du côté de Vendôme, invoquant l’aspect sanitaire, le maire avait constaté que « la fermeture d’un grand nombre de petits commerces générait une accumulation des foules dans les hypermarchés. » Dans chacune de ces affaires, les arrêtés étaient temporaires et cessaient « avec le rétablissement de l’égalité. » De quoi justifier, selon les maires incriminés, de plaider la nullité ou l’irrecevabilité de la saisine de la préfecture, car le Premier ministre avait décidé de fermer certains rayons de grandes surfaces très rapidement après les premiers arrêtés. Ceux-ci avaient été envoyés et reçus en préfecture, mais avaient été aussi, a minima, affichés dans la commune : même s’ils n’ont eu qu’une brève durée, voire aucun effet, ils ont tout de même existé.
Quid du pouvoir de police du maire ?
La rapporteure publique a fait référence à l’avis du Conseil d’État, faisant jurisprudence sur le sujet, qui avait retoqué la commune de Sceaux, laquelle avait, le 6 avril 2020, subordonné les déplacements dans l’espace public des personnes de plus de 10 ans au port d’un dispositif de protection buccal et nasal. Dans son avis en date du 17 avril 2020, le Conseil d’État indiquait en effet que « le maire n’était pas compétent pour faire usage de ses pouvoirs de police générale dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire dès lors que (…) l’article L. 3131-17 du Code de la santé publique réservait au seul représentant de l’État territorialement compétent, habilité par le Premier ministre ou le ministre chargé de la Santé, le pouvoir de prendre des mesures tendant à la mise en œuvre du régime d’état d’urgence sanitaire ».
La rapporteure publique a ainsi rappelé que le pouvoir de police des maires dans le cadre de l’état d’urgence devait être être proportionné à des raisons impérieuses propres à la commune et ne devait pas être susceptible de compromettre la cohérence et l’efficacité des mesures prises par l’État dans le cadre de ses propres pouvoirs de police. Autant dire qu’il y a de bonnes chances que le délibéré du Tribunal administratif, attendu le 17 mai prochain, ne soit pas en faveur des élus.