Nouvel épisode dans la petite guerre qui oppose les pouvoirs publics aux boutiques de cannabidiol (CBD). Le conseil d’État a suspendu, le 24 janvier, l’arrêté du ministère des Solidarités et de la Santé pris fin décembre interdisant la vente de fleurs et de feuilles de cannabis contenant du CBD, pourtant reconnu comme non psychotrope, contrairement au tétrahydrocannabinol (THC), et n’autorisant leur culture qu’en vue d’une production d’extrait de chanvre qui, lui, peut être diffusé et utilisé dans des produits transformés.
Cet arrêté avait provoqué un coup de sang dans les boutiques, qui ont fleuri en nombre depuis deux-trois ans pour répondre à un marché prometteur. Parmi la quinzaine de magasins que compte Tours, si on tâchait alors de rester discret, le ressentiment était tangible. Ici, on faisait part d’une incompréhension totale de cette décision, là, on rappelait que la vente de ces fleurs représente 70 à 80 % du chiffre d’affaires, et l’on craignait pour l’avenir de la filière et des nombreux emplois qu’elle a créés. Ailleurs, on répondait que les contrôles sont faisables et simples, à l’argument du Gouvernement de la difficulté de ces contrôles.
Une décision électoraliste ?
Partout, malgré les précisions de l’arrêté sur la prise en considération de la réglementation européenne, on arguait de la décision de la Cour de justice de l’Union européenne du 19 novembre 2020, qui autorisait la vente des fleurs, ainsi que de celle de la Cour de cassation du 23 juin 2021 confirmant l’exclusion du CBD de la liste des produits stupéfiants. La suspicion d’une décision électoraliste semblait assez partagée. Si, dans les boutiques, on faisait le gros dos, la plupart des vendeurs s’étaient joints au recours en référé, déposé le 14 janvier dernier, soit par l’intermédiaire des organisations professionnelles comme l’Union des professionnels du CBD, soit individuellement, auprès du Conseil d’État pour annulation de l’arrêté. Avec cette suspension, si les vendeurs se disent un peu rassurés, c’est une annulation pure et simple du texte qu’ils espèrent désormais – une pétition des professionnels circule sur internet –, ainsi qu’une « vraie loi » encadrant le commerce et la production du chanvre, tout en s’inquiétant d’autres tentatives gouvernementales éventuelles.