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Gand, un exemple inspirant pour la réduction de la pollution en milieu urbain

Gand, un exemple inspirant pour la réduction de la pollution en milieu urbain

À l’horizon 2025, toutes les agglomérations françaises de plus de 150 000 habitants devront créer une zone à faibles émissions (ZFE). Tours et Joué-lès-Tours sont concernées. Mesure inégalitaire souvent qualifiée de « bombe sociale », elle est décriée jusque dans les rangs de la majorité présidentielle. Pourtant, d’autres solutions existent pour réduire efficacement la pollution en milieu urbain, comme à Gand (Belgique) où un plan de circulation a été instauré en 2017 qui a permis le développement des modes actifs, vélos et marche.
par mathis navard, animateur du blog letramdetours.net, et alain devineau, ancien adjoint à l’urbanisme, en charge de la 1re ligne de tramway de 2008 à 2014 sous jean germain.

ZFE. Voilà trois lettres qui n’ont pas fini de faire parler d’elles. Déjà instaurées dans les 13 plus grandes villes françaises, les zones à faibles émissions seront généralisées au 1er janvier 2025 à toutes les aires urbaines de plus de 150 000 habitants. Parmi les 43 communes concernées, Tours et Joué-lès-Tours y figurent. Alors que la pollution de l’air est responsable de 40 000 décès par an, l’État souhaite bannir tous les véhicules dotés de vignettes Crit’Air 4 et 5. Une décision globalement mal vécue par la population et critiquée par une large partie de la classe politique. « Cela devrait pénaliser surtout les habitants qui n’ont pas les moyens de s’acheter des véhicules plus récents », déplore un élu de l’opposition à Tours, soutien de la majorité présidentielle.

Une mesure louable, une mise en œuvre discutable

Difficile de ne pas lui donner raison quand on sait que les véhicules concernés – les diesels mis en circulation avant le 1er janvier 2006 et les essences antérieurs au 1er janvier 1997 – sont majoritairement possédés par les ménages les plus précaires et résidant en périphérie. Si l’objectif d’une telle mesure est louable, sa mise en œuvre est discutable. Pour l’heure, ni le périmètre de la zone ni les modalités de contrôle n’ont été déterminés. Une première réunion ministérielle s’est pourtant tenue en octobre dernier en présence de Frédéric Augis, président de Tours Métropole et maire de Joué-lès-Tours, et d’Emmanuel Denis, maire de Tours et nouvellement élu vice-président métropolitain délégué aux mobilités.

Gand, une source d’inspiration pour Tours

Avec un réseau de transport en commun performant, un schéma cyclable, une 2e ligne de tramway en projet et la valorisation d’une étoile ferroviaire dans les cartons, la métropole tourangelle ne manque pourtant pas d’atouts pour s’engager dans une autre voie. La Ville de Tours semble l’avoir déjà compris en décidant d’élaborer un nouveau plan de circulation. Un groupement composé de trois cabinets de conseil a été mandaté dès décembre dernier. En mars, il a été à la rencontre des habitants afin d’établir un premier diagnostic à l’occasion des assemblées de Tours. En la matière, une ville fait référence : Gand en Belgique.

Mais qu’a-t-elle de si particulier ? Pour le savoir, nous nous sommes rendus dans cette commune de 265 000 habitants, chef-lieu de la province de la province de Flandre-Orientale. Sitôt sortis de la gare de « Gent-Sint-Pieters », nous ne pouvons qu’être frappés par l’atmosphère si particulière qui semble régner ici. Les piétons et les cyclistes évoluent au cœur d’une grande plateforme intermodale où tramways et autobus cohabitent. Les voitures y circulent également, mais savent se faire discrètes en roulant au pas.

Et pourtant, la ville n’a pas toujours ressemblé à cela. Jusque dans les années 1980, le réseau de tramway a connu une lente érosion. Aujourd’hui, trois lignes sont en service, contre neuf il y a 100 ans. Dans l’immédiat après-guerre, Gand – comme toutes les villes d’Europe de l’Ouest – a succombé au « tout-automobile ». Consciente des effets délétères d’une telle politique sur la qualité de vie et la pollution, ce n’est réellement qu’à partir des années 1990 qu’elle décide de prendre son destin en main.

Fluidité et sécurité : tout le monde y gagne

À cette époque, un premier plan cyclable articulé autour de quatre axes est conçu. Plusieurs programmes successifs seront ensuite déployés, mais les élus réalisent que modifier les comportements sera long et coûteux. En 2012, la Ville décide de se doter de son premier plan de mobilité, avec des objectifs ambitieux : passer la part modale de la voiture de 55 % à 27 % d’ici 2030, et celle du vélo de 22 % à 35 %. Gand entend ainsi apaiser ses quartiers en contraignant davantage le trafic de transit et ainsi réduire la circulation en centre-ville. Tout le monde est gagnant. Automobilistes et utilisateurs des transports en commun bénéficient de trajets plus fluides et la baisse de la pression routière favorise les modes actifs.

Dès 2015, la voiture ne représentait plus que 46 % des déplacements et le vélo culminait déjà à 30 %. D’excellents résultats obtenus grâce à la préexistence d’infrastructures cyclables de qualité. Gand fut par exemple la première ville belge à introduire des vélorues à partir de 2011, sur le même modèle que la rue d’Entraigues à Tours. Forte de ces bons chiffres, la municipalité a décidé d’aller plus loin en lançant un plan intégral de mobilité qui concerne à la fois la circulation, le stationnement et les politiques liées à l’espace public. La Ville a souhaité s’engager dans un urbanisme dit « tactique » où des préfigurations préparent à de nouveaux usages qui seront ensuite ajustés et pérennisés. Un forum participatif, avec un panel représentatif de 150 citoyens, est alors mis en place.

Quand le trafic s’évapore…

À l’issue de ce processus de concertation, le « circulatieplan » – tel qu’il est dénommé en flamand – est déployé en moins d’une semaine en avril 2017. Le secteur piéton connaît à cette occasion une extension fulgurante et passe de 35 à 51 hectares. Il est interdit aux cyclistes en journée. Pour les automobilistes, l’hypercentre est divisé en six zones « étanches ». Elles sont majoritairement délimitées par des voies routières et des cours d’eau. À l’exception des transports en commun et des véhicules autorisés grâce à une lecture automatisée des plaques d’immatriculation (services de secours…), il devient impossible de passer d’une zone à l’autre. Elles restent cependant toutes accessibles aux conducteurs qui ont réellement besoin d’y accéder. Ces derniers sont accueillis dans de meilleures conditions grâce à un trafic plus fluide et davantage de stationnements disponibles. Les piétons et les cyclistes bénéficient quant à eux d’un avantage concurrentiel en termes de temps de trajet lorsqu’il est question de traverser plusieurs zones.

En à peine un an, le vélo a atteint les 35 % de part modale, soit l’objectif initialement fixé pour 2030. Les transports en commun ont quant à eux grimpé à 14 %, contre 9 % en 2012. Le plan de circulation s’est immédiatement affiché comme la solution la moins onéreuse et la plus visible pour améliorer la qualité de l’air tout en réduisant la pression automobile et la pollution sonore. Son succès tient sans doute dans le fait qu’une large partie de la population est concernée positivement par ces changements. À ses débuts, cette initiative fut pourtant vivement critiquée jusque dans les médias nationaux. Les commerçants craignaient le pire. Si une baisse de 30 % de leur chiffre d’affaires a bel et bien été constatée durant les premiers jours du plan, il est quasi immédiatement revenu à la normale. Depuis, de nouvelles activités s’y sont développées. La marche et le vélo favorisent l’essor des commerces de proximité, à mille lieues du dogme du « no parking no business ».

Des quartiers apaisés et une tarification adaptée

40 000 stationnements restent aujour-d’hui disponibles, dont 5 000 situés dans des ouvrages bénéficiant eux aussi d’une signalisation dynamique. L’équivalent de 7 000 places a été alloué à d’autres usages : terrasses, emplacements pour vélos, zones végétalisées… 600 stationnements sont à présent dédiés à l’autopartage. Un nombre qui ne cesse de croître en raison du succès rencontré par ce service qui contribue activement à la baisse du taux de motorisation des ménages. Seulement 2 000 personnes y étaient inscrites en 2012. Elles étaient 17 000 dix ans plus tard. Aux abords du centre-ville; neuf parkings-relais ont été ajoutés aux sept déjà existants pour un total de 2 440 places. La plupart sont gratuites.

Nul doute qu’il constitue une importante source d’inspiration pour Tours. Reste à voir avec les représentants de l’État si cette proposition plus efficace et moins stigmatisante pourrait se substituer à une ZFE. Une décision relativement rapide est attendue. Dans moins de 2 ans, Tours et sa métropole devront déjà avoir agi pour améliorer la qualité de l’air sur leur territoire.

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