C’est une situation en trompe-l’œil : 93 % des chantiers ont pu reprendre en Indre-et-Loire. Mais, malgré cette reprise d’activité, le secteur n’a jamais été aussi inquiet. Il est dans une situation très inquiétante qui menace directement plusieurs milliers d’emplois en Indre-et-Loire où le secteur représente 20 000 actifs. « Si les pouvoirs publics, le gouvernement, bien sûr, mais aussi les collectivités locales et, en particulier, la région Centre-Val de Loire à qui je lance un appel solennel ne prennent pas de mesures pour soutenir notre secteur, nous connaîtrons une catastrophe sociale d’une ampleur sans précédent », s’alarme Stéphane Pouëssel, le président de la FFB 37, « combatif mais très inquiet car personne ne semble prendre conscience de la menace qui pèse sur nos entreprises et donc sur l’emploi ».
Rappelant au passage qu’en France, le secteur du bâtiment représente 2 millions d’emplois, deux fois plus que le secteur des banques et assurances ou sept fois plus que l’aéronautique (300 000 emplois) qui a bénéficié pourtant d’un plan d’aides de 15 milliards alors que pour l’instant aucun plan de soutien n’est en vu pour ce secteur qui a aussi bénéficié des mesures d’accompagnement mises en place par l’État pour faire face à la crise sanitaire, « ce dont je me félicite, précise Stéphane Pouëssel, mais c’est très insuffisant ».
Les entreprises travaillent à perte
Le danger est ailleurs et tient en plusieurs facteurs qui se cumulent pour fragiliser les entreprises. D’abord, même si elles ont repris le travail, elles ont perdu un mois et demi d’activité, soit un manque à gagner de 10 à 15 % de leur chiffre d’affaires annuel ; ensuite, même si elles ont repris, elles l’ont fait dans des conditions telles qu’elles travaillent à perte. D’abord parce qu’il y a un surcoût d’environ 10 % sur chaque chantier en raison des mesures sanitaires à appliquer. Un surcoût que les entreprises prennent à leur charge car elles ne peuvent pas augmenter la facture alors que les devis ont été établis avant la crise. Ensuite parce que l’application des règles sanitaires, comme la désinfection systématique du chantier, rallonge considérablement sa durée. Résultat : si le chantier dure plus longtemps, l’entreprise est aussi de sa poche. Concrètement, aujourd’hui, elles travaillent à perte depuis la reprise et ne pourront faire face dans quelques mois aux échéances avec des trésoreries exsangues. Certaines disparaîtront alors purement et simplement, d’autres procéderont à des licenciements pour tenter de sauver les meubles.
« Nous allons dans le mur, insiste Stéphane Pouëssel. C’est pour cela que nous demandons l’annulation pure et simple des charges fiscales et sociales sur la période de crise et la prise en charge par les pouvoirs publics et collectivités du surcoût liés à la Covid. Cela représente 44 M€ à l’échelle régionale. Nous demandons aussi une aide de 4 M€ pour aider les entreprises les plus en difficulté. » Autre demande portée par la FFB au niveau national : le retour à une TVA à 5,5 % pour l’ensemble des travaux et un plan massif de rénovation énergétique pour soutenir le secteur à moyen terme. Mais l’urgence, c’est de rétablir la rentabilité des entreprises. Et cela ne peut pas attendre un plan hypothétique. La FFB entend profiter de la nouvelle loi rectificative des finances qui doit être votée au parlement en juillet pour faire appliquer ces mesures dès la rentrée. Car sinon, c’est un véritable tsunami qui pourrait submerger, avant la fin de l’année, un secteur du bâtiment fragilisé avec de graves conséquences sur l’emploi…