Il aura fallu près de trois heures de débat et une bonne vingtaine d’intervenants pour que soit acté le passage par le boulevard Jean-Royer et l’engagement financier de la Métropole auprès du SMT (Syndicat des Mobilités de Touraine) auquel la collectivité délègue la maîtrise d’ouvrage du projet. Tous les aspects et les problèmes soulevés par cette 2e ligne ont été abordés lors d’un échange d’une rare richesse.
Tout d’abord le tracé par Jean-Royer. Mais y a-t-il une autre possibilité ? Ce qui entraîne une baisse de fréquentation de 45 000 à 35 000 passagers par jour par rapport à l’itinéraire Béranger initialement retenu, et donc un manque à gagner sur les recettes, ce qui renchérit encore le coût de cette 2e ligne. Même si selon les techniciens, cette perte sera compensée par la fréquentation accrue de la nouvelle ligne de bus BHNS qui reliera la gare aux Atlantes… Ce tracé a donc été entériné à une large majorité même s’il ne fait pas l’unanimité. Mais encore une fois, quelle alternative si le boulevard Béranger doit être préservé et que la rue des Tanneurs n’a pas été retenue dès le départ ? Un amendement déposé par les élus d’opposition de droite à Tours, emmenés par Romain Brutineau et Christophe Bouchet, proposant une 2e demi-ligne de la gare au CHU Trousseau, soit deux fois plus courte pour réduire le budget à 200 M€, n’a pas été retenu. Le chapitre sur la demi-ligne prônée par certains et serpent de mer depuis deux ans, est définitivement clos : la ligne sera entière, conforme au projet initial validé par les services de l’État, même si un doute subsiste sur le tronçon hôpital Trousseau - La Papoterie que certains jugent trop coûteux par rapport au nombre de passagers attendus au-delà du CHU…
Les études continuent pour la 3e ligne
Le coût ensuite : 530 M€ annoncé à ce jour, soit 100 M€ de plus que le projet initial voté en décembre 2018. L’inflation et plus de quatre ans de retard et de tergiversations sont passés par là. Le coût semble en effet exorbitant pour le commun des mortels dans le contexte actuel de resserrement des finances publiques. Mais selon les élus, le jeu en vaut la chandelle. Comme l’avance Cathy Savourey, adjointe à Tours, « je voterai pour cette 2e ligne pour des raisons écologiques et économiques car elle va permettre de réaliser des économies aux ménages qui l’utiliseront, ils pourront laisser leur voiture au garage, donc le coût n’est pas excessif au regard des gains réalisés par les usagers… ». Un aspect des choses trop souvent oublié…
Sur le registre connexe du financement, le débat a été vif sur les capacités de la Métropole à financer un tel projet mais il a surtout permis d’éclairer ce financement d’un jour nouveau. C’est ainsi que l’on a appris de la part du vice-président aux finances Christian Gatard, maire de Chambray-lès-Tours, que les subventions qu’il faudra verser au SMT (14 M€ par an, 3 en investissement, 11 en fonctionnement) ne représentent que quelques pourcents des capacités d’investissements de la Métropole (dont le budget d’investissements voté chaque année est de l’ordre de 100 M€ pour 70 M€ environ réellement consommés). On a aussi appris de la bouche de Philippe Briand, ancien président, aujourd’hui vice-président aux relations internationales et institutionnelles, que le taux d’endettement de la Métropole était faible, qu’ils avaient veillé ces dernières années à ne pas endetter l’intercommunalité, justement en prévision de cette 2e ligne de tramway et qu’il y avait donc possibilité de recourir à l’emprunt pour la financer. Sans avoir besoin de créer un nouvel impôt. Ce qui a rassuré nombre de conseillers absolument opposés à un impôt nouveau dans le contexte d’inflation actuel. De même, les conseillers ont été rassurés sur le fait que cette 2e ligne n’empêcherait pas le développement du réseau avec une 3e branche vers Saint-Cyr-sur-Loire. « Les études sur les autres branches n’ont jamais cessé, a ainsi affirmé Emmanuel Denis, vice-président en charge des mobilités. Et nous sommes sur le point d’aboutir à un tracé pertinent sur la branche de Saint-Cyr. Cela passera sans doute dans un premier temps par un bus à haut niveau de service pour préfigurer la ligne mais elle pourra voir le jour. »
Des pistes pour réaliser des économies
En revanche, le maire de Saint-Pierre-des-Corps, Emmanuel François, n’a pas été rassuré sur le 4e tronçon vers sa ville. « Nous avons la double peine, pas de ligne de tramway et donc pas d’embellissement de la ville qui compte tout de même 6 000 habitants et dont le quartier de La Rabaterie est le plus pauvre de la Métropole. Il mériterait aussi d’être désenclavé. Et ce n’est pas la BHNS vers les Atlantes qui va compenser cette absence de tramway sur notre commune… » Ce à quoi, Christophe Boulanger, élu à Tours et président du SMT, grand spécialiste des mobilités, lui a rétorqué qu’en attendant le futur projet d’aménagement de la zone sud de la gare TGV, il était difficile d’envisager une autre solution que le BHNS…
Différentes pistes pour réaliser des économies ont encore été évoquées (diminution des rames de 40 à 30 m), passage à une seule voie boulevard Jean-Royer ou arrêt de la ligne à Trousseau au lieu de la Papoterie, 2 km plus loin, etc.). Mais l’affaire est entendue : la Métropole a les moyens de financer ce projet. Et les élus ont voté les garanties pour le SMT qui doit souscrire d’ici fin juin un premier emprunt de 130 M€ auprès de la BEI (Banque Européenne d’Investissement) pour (re)mettre enfin cette ligne B du tramway sur les rails !
Car la finalité d’un tel projet, il ne faut pas l’oublier, c’est bien de réduire la part de la voiture pour faire baisser les émissions de CO2 et tenter de limiter le réchauffement climatique d’ici 2050… Alors hop, tout le monde à bord, on a déjà perdu assez de temps !
