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Véronique Garnier : L’enfant Sauvé(e)
Portrait

Véronique Garnier : L’enfant Sauvé(e)

Véronique Garnier est bien connue dans le diocèse d’Orléans et même au-delà : elle fait en effet partie des rares victimes d’abus sexuels au sein de l’Église qui ont osé rompre le silence, sans pour autant couper le lien avec l’Église catholique.
Gaëla Messerli
1961 : Naissance à Nancy
2014 : Participe à la première cellule d’écoute des victimes d’abus sexuels dans l’Église
Mai 2022 : Parution du livre La vérité nous rendra libres

Chacun porte sa croix, mais certains ont choisi de faire en sorte que leur expérience, aussi douloureuse fût-elle, serve à protéger les plus fragiles. C’est un peu le sens du combat de Véronique Garnier, qui se considère aujourd’hui « au bord de l’Église, mais faisant partie du corps du Christ ». Même si elle reste « écorchée vive », la Foi l’habite encore malgré les abus sexuels qu’elle a subis de 10 à 15 ans par un prêtre, ami de la famille dans son diocèse natal de Nancy. « Je suis encore chrétienne, même christienne », explique celle qui a été, à une époque, déléguée épiscopale pour la protection des mineurs au diocèse d’Orléans et qui est aujourd’hui co-responsable du service de protection, de prévention et d’éducation au sein de ce même diocèse.

Sa planche de salut reste « l’Espérance », mais une Espérance loin d’être contemplative, car Véronique Garnier, après avoir témoigné auprès de la commission de Jean-Marc Sauvé sur les abus sexuels dans l’Église (CIASE), continue de s’investir dans des ateliers post-CIASE avec la Conférence des Évêques de France et celle des religieux. « Il faudrait une pastorale des victimes », se désole cette ancienne infirmière, qui vient de publier, en mai, son deuxième livre, La vérité nous rendra libres. Tel en est le titre, inspiré par l’Évangile selon saint Jean. Ce livre, Véronique Garnier l’a écrit avec la théologienne Karlijn Demasure et la religieuse et psychothérapeute Anne Descour, Provinciale de France des religieuses de l’Assomption. Un ouvrage également sous-titré Paroles de femmes dans la crise des abus, qui dépasse le témoignage et offre une analyse de la crise que connaît l’Église ainsi que des pistes pour sortir de ce problème systémique. Avant de témoigner à Lourdes ou à Rome, et même d’intervenir à l’Université au Canada, Véronique Garnier a mis du temps. Cette Lorraine d’origine, aujourd’hui pryvataine, n’a d’ailleurs pris conscience que très récemment que son calvaire avait commencé plus tôt qu’elle ne l’imaginait, vers 10 ans, par des attouchements subis sur les genoux du prêtre qui venait déjeuner avec sa famille. Des abus sexuels qui se sont répétés jusqu’à ses 15 ans. « Je lui ai demandé si c’était bien ce qui se passait, car je n’y connaissais vraiment rien…, se souvient-elle en parlant de son agresseur. Il m’a dit que nous ne faisions rien de mal, mais qu’il ne fallait le dire à personne… » Malgré le déclic, lorsque Véronique Garnier s’en est ouvert à sa mère, rien n’a changé : l’agresseur était toujours invité à la table de la famille. Le supplice était d’autant plus cruel qu’elle devait recevoir la communion de la main même de ce prêtre. « J’ai réussi à pardonner à mes parents, car ils étaient sous emprise », évoque, avec le recul, cette femme qui a cherché à fuir Nancy en allant terminer ses études d’infirmière à Lyon. Malgré son rapport douloureux à la pratique religieuse, elle poussa la porte de la Communauté du Chemin Neuf, car la théologie l’intéressait. Bien lui en prit, car c’est en son sein qu’elle rencontra Pascal, son mari. La famille arriva en 1989 dans l’Orléanais, mais ce n’est qu’en 2010, à l’époque où plusieurs affaires furent relayées par les médias, que le traumatisme refit surface. Véronique Garnier se décida à écrire à l’évêque du diocèse de son enfance pour lui expliquer ce qu’elle avait subi. « Et il m’a répondu », souligne celle qui a également rencontré Jacques Blaquart, l’évêque d’Orléans. Elle fit d’ailleurs partie de la première cellule d’écoute des victimes d’abus sexuels dans l’Église mise en place en 2014 par l’évêque orléanais.

Aide aux victimes

Depuis, Véronique Garnier explique avoir prié pendant un an pour que le rapport Sauvé soit accepté par les catholiques. « Rejeter le rapport de la CIASE, c’est nous rejeter, nous, les victimes ! » insiste-t-elle. Aux mauvaises langues qui persiflent que les victimes cherchent à soutirer de l’argent aux diocèses, la Pryvataine rappelle, avec pudeur, les conséquences des abus subis dans leur vie et celle de leur famille. Aujourd’hui, Véronique Garnier recherche l’apaisement et milite pour la prévention. Elle prépare d’ailleurs la journée pour les victimes à Beaugency, le 24 septembre.

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