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Retraites : la prochaine réforme présentée par Elisabeth Borne, une réforme « équilibrée » ou un recul pour les travailleurs ?

Retraites : la prochaine réforme présentée par Elisabeth Borne, une réforme « équilibrée » ou un recul pour les travailleurs ?

La semaine dernière, Elisabeth Borne a présenté les grandes lignes de la prochaine réforme des retraites, qui promet certes un recul de l’âge légal (64 ans) et un allongement de la durée de cotisation (43 ans), mais dont Caroline Janvier, députée loirétaine de la majorité, tient à pointer les mesures d’avancée sociale.
Benjamin Vasset
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Reprendriez-vous les mots d’Elisabeth Borne, qui utilise le mot de « justice » pour qualifier cette réforme des retraites présentée la semaine dernière ?

Oui, c’est une réforme de responsabilité, qui porte des avancées en matière de justice sociale, notamment pour les petites retraites. Et il y a aussi une vraie prise en compte de l’usure pour certains métiers.

En quoi faire travailler les gens plus longtemps fait avancer le « progrès social », comme l’a aussi dit la Première ministre ?

Il s’agit d’une réforme nécessaire, car sinon nous ne serons pas capables, en 2030, d’équilibrer le système. Évidemment, quand on dit aux Français qu’ils devront travailler plusieurs mois de plus, on sait que c’est difficile. Évidemment on leur demande un effort, mais je veux insister sur les avancées : nous allons baisser le déficit de 12 milliards d’euros en 2027, puis faire 5 milliards d’excédents en 2030, qui permettront notamment d’investir dans un fonds pour la prévention de l’usure professionnelle.

Quel est exactement l’objectif de ce fonds ?

Il va permettre d’éviter (sic) la pénibilité en investissant dans des équipements : par exemple, dans des EHPAD, si on investit dans des rails pour transporter les patients, l’usure professionnelle des aides-soignants ne sera pas la même. Il y aura aussi des actions en termes de prévention, pour former sur les bonnes postures. De plus, sur cet aspect, il est aussi prévu d’assouplir les conditions d’accès au Compte Prévention Pénibilité (CPP), dont plus de personnes pourront
bénéficier.

Plus aucune pension de retraite inférieure à 85 % du SMIC, c’est mieux que par rapport au système actuel, mais est-ce la panacée ? Qui peut vivre avec 1 200 € (bruts) par mois ?

Évidemment, 1 200 € ce n’est certainement pas assez et ça ne résout pas tous les problèmes, mais il y a aujourd’hui énormément de retraités qui n’ont pas ces 1 200 €, parce qu’ils n’ont pas cotisé durant toute leur carrière. De plus, nous avons eu la confirmation par la Première ministre que les retraités actuels bénéficieraient de cette mesure.

Pouvez-vous préciser ce qui sera mis en place pour améliorer l’emploi des séniors dans les entreprises et éviter qu’ils ne soient plus « inembauchables » ?

Le taux d’emploi des séniors en France (30 %) est inférieur à celui d’autres pays européens comme l’Allemagne, où ce taux est à 45 %, et la Suède, où il se situe à 70 %. Or, dans ces pays-là, l’âge légal de départ à la retraite est deux, trois, voire quatre ans plus élevé qu’en France. Cela veut dire que les employeurs font un calcul qui est certes assez cynique, mais qui est celui-là : plus un salarié est proche du départ à la retraite, plus son départ est organisé. Donc, reculer l’âge de départ devrait inciter les entrepreneurs à employer ces personnes-là. Dans cette réforme, il y aura aussi d’autres dispositifs incitatifs – qui sont encore à préciser –, afin de valoriser, notamment financièrement, la transmission de compétences entre les séniors et les salariés plus jeunes. Il y aura également un volet pour faciliter la transition entre l’activité et la retraite, en ayant par exemple un temps partiel sur les dernières années afin de cumuler droits à la retraite et revenus liés à l’emploi.

Sur le timing, n’avez-vous pas peur de « heurter » les Français, qui sont aujourd’hui confrontés à une inflation record et à d’autres énormes difficultés, comme celle de se faire soigner correctement dans des délais raisonnables ?

Il n’y a pas de moment propice pour faire ce type de réforme. Je pense pour ma part qu’il faut plutôt la faire en début de mandat, parce que sinon, l’opposition peut s’organiser dans l’obstruction. Je vous rappelle que lors de la dernière réforme des retraites, 19 000 amendements avaient été déposés…

Sentez-vous les Français mobilisés sur ce sujet des retraites ?

La semaine dernière, j’avais au téléphone des journalistes politiques quasiment en PLS (sic) qui me disaient que cette réforme, c’était le tournant du quinquennat… J’ai vu aussi l’opposition défiler en ordre de bataille devant les micros en salle des quatre colonnes (où se font les interviews à l’Assemblée, ndlr). Pourtant, quand je suis allée aux différentes cérémonies de vœux en début d’année, la première chose dont me parlaient les gens, parfois en larmes, c’était l’accès aux soins. Oui, je pense qu’il y a une forme d’exagération et un prisme politico-médiatique.

Peut-être aussi que les gens, au fond, ne comprennent pas grand-chose à cette réforme…

Le problème, c’est que ses aspects un peu « difficiles », comme l’allongement de l’âge légal, sont assez faciles à comprendre alors qu’à l’inverse, les gains, comme le CPP, le sont moins. D’une façon plus générale, ce dossier n’est pas, je pense, le sujet principal de préoccupation des gens, qui ont aussi l’impression qu’il y a une forme d’opportunisme politique et syndical dans l’opposition à cette réforme. La ficelle, tendue par des professionnels de la mobilisation, est un peu grosse.

Justement, une journée de mobilisation est prévue ce jeudi dans les rues. Comment comptez-vous apaiser le mécontentement ?

On va déjà voir le niveau de mobilisation et qui elle concerne, si cela va au-delà des syndicats et de l’opposition politique. Vous savez, nous voyons très vite quand la colère monte, nous recevons alors des messages, des courriers, des demandes de rendez-vous d’organisations et de particuliers… Nous verrons bien.

Craignez-vous un long marathon législatif, voire une nouvelle utilisation du 49.3 ?

Non, puisqu’en vertu de l’article 47.1, nous avons vingt jours maximum pour examiner le Projet de Loi rectificatif de Financement de la Sécurité Sociale, dans lequel est contenu cette réforme. À l’issue de ces vingt jours, si ce texte n’est pas approuvé par l’Assemblée, il sera transmis sans vote au Sénat, enrichi par les amendements qu’aura décidé le Gouvernement. Et ensuite, il y aura un échange en commission mixte paritaire Sénat/Assemblée. Les choses ne s’éterniseront pas, d’autant qu’il y a eu des concertations ouvertes depuis des mois.

Le soutien des députés LR laisse entrevoir une issue positive pour la majorité…

Oui, mais la porte était ouverte à l’ensemble des groupes. Évidemment, les députés LR ont déposé des conditions (64 au lieu de 65 ans, par exemple), et ils ont dit qu’ils voteraient la réforme si ces conditions étaient respectées, mais ça n’empêchera pas d’autres groupes de faire de l’obstruction.

A priori, la majorité est encore ouverte à la discussion sur certains points. Sur quoi cette réforme peut-elle encore être amendée ?

Moi, j’ai en tête cette question de l’emploi des séniors, avec la création d’un « index des séniors » que les entreprises devront remplir pour être plus transparentes dans la façon dont elles emploient ces personnes. Il y a aussi des choses à creuser sur la question des carrières des femmes, et préciser également la prise en compte de la pénibilité.

Finalement, entre la réforme avortée et prévue à l’époque sous Édouard Philippe et celle-ci, laquelle préférez-vous… ?

Je trouve celle-ci plus équilibrée et peut-être plus responsable que la réforme par points ; elle ne permet certes pas de simplifier le système avec un régime universel – certains régimes spéciaux sont conservés –, mais elle permet d’assurer le versement des pensions. Et j’insiste : cette réforme comporte beaucoup d’éléments de justice sociale.

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