Comme vous l’aurez peut-être lu dans ce numéro, nous avons souhaité aborder la délicate question de la « proximité », qui fait s’arracher les cheveux des technocrates les plus émérites jusqu’aux petites mains des administrations, à portée d’engueulade de leurs concitoyens. Si ce sujet mérite qu’on s’y intéresse, c’est parce que la poussée du vote « extrême » en France serait la conséquence d’un abandon – à la fois réel et ressenti – des citoyens dans leur « vie de tous les jours ». De la lente disparition des bistrots de campagne jusqu’aux fermetures progressives des bureaux de Poste, une partie de la population s’est retrouvée livrée à elle-même face à un monde dont elle ne maîtrise plus les codes.
Les « décideurs », c’est-à-dire ceux qui ont le pouvoir et ceux qui sont chargés de l’appliquer, ne sont pas assez bêtes pour ne pas l’avoir compris, mais ont malheureusement eu tendance, ces dernières années, à mettre la charrue avant les bœufs, avec la tentation de prendre leurs administrés pour des jambons. Le point d’orgue de cette « proximité » prise par le mauvais bout : l’invention de la « démocratie participative » – pléonasme ectoplasmique qui, en plus de mobiliser du jus de crâne, donne l’illusion de remettre le « citoyen » au cœur de l’équation. On voit le résultat : jamais l’abstention n’a été aussi importante dans le pays. Pour notre part, on pense que c’est en remettant d’abord de la pédagogie pour démêler les rouages d’un système parfois kafkaïen qu’on rapprochera les Français de la politique et, plus important, du politique. Quelques-uns des « outils » mis en place récemment – tiers-lieux, maisons France Services – sont un bon début de réponse, concret et palpable, pour répondre aux besoins réels des habitants. Mais ces initiatives doivent se multiplier partout, plus vite, pour préserver l’unité d’une Nation qui ne vivra pas éternellement sur son amour de la cocarde.
