Hasard du calendrier : dans la nuit de jeudi 16 à vendredi 17 mars, le cambriolage du bar-tabac La Civette à L’Île-Bouchard est venu illustrer à quel point les buralistes étaient des cibles privilégiées des trafiquants de tabac. Car ce qui intéresse avant tout les cambrioleurs c’est de mettre la main sur le stock de cigarettes pour pouvoir l’écouler ensuite sur le marché parallèle. « Avec l’augmentation du prix du tabac, il y a une recrudescence du trafic, a expliqué le Préfet d’Indre-et-Loire, Patrice Latron. Ce trafic est principalement alimenté par du tabac de contrebande importé illégalement en France, même si on a aussi récemment démantelé des ateliers de production clandestins en région parisienne. Mais il est aussi alimenté par ces cambriolages ».
C’est dans ce contexte que les services de l’Etat (Douanes, Police, Gendarmerie) représentés par le Préfet ont signé la Convention nationale de lutte contre les marchés parallèles du tabac avec les représentants de la fédération départementale des buralistes d’Indre-et-Loire présidée par Matthieu Meunier. Cette convention – qui avait été signée au plan national par le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin en janvier 2022 – vise à renforcer la coopération entre les buralistes et les services de police-justice pour lutter contre ce trafic ainsi qu’à améliorer la sécurité des points de vente de tabac en les rendant moins vulnérables aux cambriolages. « Nous sommes des préposés de l’administration puisque nous collectons pour l’État les taxes sur la vente du tabac et, à ce titre, il faut tout mettre en œuvre pour renforcer la sécurité de nos membres qui sont de plus en plus exposés », précise Matthieu Meunier, buraliste à Sainte-Catherine-de-Fierbois. Ce n’est pas Patricia Corsaletti, gérante de La Civette à L’Île-Bouchard, qui le démentira, elle qui expliquait à La Nouvelle République au lendemain du cambriolage dont elle a été victime qu’« entre les agressions au magasin, les tentatives de cambriolage et les cambriolages, j’en suis à la dix-huitième tentative ». Pour autant, il n’y a eu « que » trois cambriolages de bureau de tabac en Indre-et-Loire en 2022. Mais c’est toujours trois de trop car, à chaque fois, ce sont plusieurs milliers – voire dizaines de milliers d’euros – de préjudice.
Des paquets de cigarettes traçables
La convention prévoit notamment la réalisation d’audits de sécurité par les services de police ou de gendarmerie à la demande des buralistes. « C’est un service gratuit qui permet d’identifier les mesures à mettre en œuvre pour renforcer la sécurité de nos points de vente », se félicite Matthieu Meunier. Les buralistes peuvent aussi bénéficier d’une aide financière pour doter leur établissement d’équipements de sécurité. « 62 buralistes ont déjà bénéficié ces dernières années d’une aide de l’État pour un budget total de 233 000 € », a précisé Abdelhafid El Fassi, chef du pôle contrôles à la Direction régionale des Douanes d’Orléans. De nouvelles aides pour équiper les bureaux de tabac en matériels de sécurité sont prévues dans cette convention. « La peur doit changer de camp » positive Matthieu Meunier.
Ces dispositifs de sécurité consistent notamment en l’installation de caméras et systèmes de vidéo-surveillance, de rideaux de fer, de vitrages renforcés ou encore de générateurs de fumigènes qui marquent la marchandise volée. Les Douanes ont aussi développé un marquage des paquets de cigarettes qui permet d’identifier leur provenance lors de contrôles sur des points de trafics. Enfin, une application « Stop trafic tabac » a aussi été développée pour permettre à tout citoyen de signaler un trafic de tabac directement auprès des Douanes. Tous ces dispositifs contribuent à rassurer les buralistes qui espèrent que ces mesures seront suffisamment dissuasives pour empêcher des attaques contre leurs points de ventes, même si le risque zéro n’existe pas.