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Chimène D. Drapée de plumes
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Chimène D. Drapée de plumes

Chimène D. Drapée de plumes

Une reconversion professionnelle plus tard, Chimène vit désormais de sa passion : le crochet, la broderie, la plumasserie. Si elle travaille essentiellement avec de grands noms de la mode de luxe, son petit atelier se trouve à Saint-Cyr-en-Val. claire seznec
Claire Seznec
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Des plumes de paon, des tissus plissés avec application, des perles de toutes les couleurs, des rubans par dizaines, une vieille machine à coudre, un mannequin de couture, un fauteuil de froufrous vêtu, des aiguilles à crochet et à coudre çà et là… Dans l’atelier de Chimène D., tout semble prendre une place incroyable, rendant sans doute l’endroit encore plus petit qu’il n’en a l’air. S’y déplacer demande d’être précautionneux : pas question de faire chuter un objet ou un tissu installé là.

Dior, Givenchy, Chanel…

Pourtant, de cet écrin créatif aux allures bordéliques émane un sentiment de bien-être. On est ici dans l’antre d’une Saint-Cyrienne à l’imagination sans limite. « Je devais retrouver une activité qui m’anime vraiment, qui porte les mêmes valeurs que les miennes, lance Chimène entre deux déballages de tissus. Le crochet et le tricot ont toujours fait partie de ma vie. » Après plusieurs années à travailler dans le tourisme sans avoir de pied-à-terre, la trentenaire a décidé, en 2016, d’aller en Lorraine passer un CAP en candidat libre en broderie de Lunéville. Diplôme en poche, elle a commencé comme intérimaire pour de grandes maisons de luxe, à Paris, comme Dior, Givenchy, Yves-Saint-Laurent, des noms qui en font rêver plus d’un. « J’ai été formée sur le tas en plumasserie, à La Marie, atelier de chez Chanel », précise Chimène. Forte de ces expériences, elle a posé ses valises dans son Loiret natal, à Saint-Cyr-en-Val, en 2019. Crochet, broderie, plumasserie : la technicienne mêle trois savoir-faire, de la création à l’exécution. Son métier est d’agrémenter des vêtements avec exigence et minutie, au demi-millimètre près. « Finalement, je suis décoratrice d’objet, lance-t-elle, en souriant. Je fais du beau et de l’inutile. » 

Tout futile que puisse être l’habillage d’un tableau, d’une chemise ou d’une coiffe, il n’en est pas moins que ce métier demande un travail titanesque. La réalisation d’une pièce peut prendre de longues heures, parfois plusieurs jours. En 2017, Chimène a réalisé une
ombrelle, nommée La Reine, un travail de broderie complexe qui a abouti après… 70 heures de travail. Car un point de broderie raté, et il faut réparer. Une perle ou une paillette mal insérée, et il faut recommencer. Une plume coupée et peignée différemment des autres, et le rendu est imparfait. Le choix des couleurs et des matières, selon la lumière, est primordial. Le velours ne rend pas comme la dentelle : la plume de coq et celle de faisan offrent deux mondes distincts. 

Savoir-faire historique

Malgré ces heures de travail et de concentration, la satisfaction de « fabriquer quelque chose » anime Chimène. De mois en mois, elle navigue entre les projets. Cette liberté totale lui a permis de créer des broderies en chocolat pour le Salon du Chocolat de Paris, en octobre dernier ; puis de se lancer dans des décorations de Noël pour des vitrines, dans la capitale mais aussi dans le Loiret. « Tout est prodigieusement différent, c’est exaltant, souligne la brodeuse. Je fais le choix assumé de toucher à tout, je ne m’ennuie jamais. » Elle écume les routes à bord de son bolide, pour rencontrer des clients, mettre en place une décoration brodée ou plumée imaginée par ses soins, ou même continuer à se former. Ces dernières semaines, la jeune femme s’est perfectionnée en couture d’ameublement, en tapisserie pour coussins de canapé, pour exemple. Dans la région Centre-Val de Loire, peu d’artisans travaillent dans ce domaine. L’une d’elles, dans le Loir-et-Cher, permet à la Saint-Cyrienne de venir découvrir cet art chez elle, un peu à la manière des compagnons du devoir, afin de perpétuer un savoir-faire souvent historique. Dans la vallée de la Loire, cela prend tout son sens. Chimène aimerait d’ailleurs développer ses travaux de restauration de tissus. Dans son atelier, lors de notre venue, trônait sur un mannequin une cape noire et argent datant de plusieurs siècles. « Mon rapport à l’art et à l’histoire de l’art, au passé, m’a poussée à accepter de la réparer et d’en prendre soin, raconte-elle, des étoiles dans les yeux. Cette cape est incroyable dans la finesse des broderies. Certains éléments de conception nous restent inconnus ! » On ose à peine effleurer ce tissu, tant il porte en lui des souvenirs d’antan. Bientôt, la brodeuse va travailler avec les tapisseries Langlois, à Blois, qui œuvrent depuis 1865 à la sauvegarde du patrimoine tissé. C’est aussi à cela qu’elle se forme et complète ses compétences. 

La Nomade

Bien qu’elle garde un pied à Paris où se trouvent ses clients principaux, Chimène va déménager au cœur de la Sologne, en pleine nature. Elle quittera son minuscule atelier de Saint-Cyr-en-Val. Elle entrera dans un lieu, son lieu. Plus grand. Avec une pièce adéquate pour ranger correctement ses velours, ses dentelles, ses tissus plissés, ses perles et ses plumes à l’abri de la lumière du jour, celle qui décolore tout sur son passage. Car les matières premières haut de gamme ont besoin d’être loin de la poussière, d’être chouchoutées. Il y a aussi toutes les toiles de la brodeuse. Il s’agit de son projet artistique personnel, appelé La Nomade, un surnom qui lui colle à la peau. De grands formats se parent de plumes d’émeus, de perdreaux, de canards et de paons. L’artisane prévoit même une exposition, sans doute en Sologne, dans les mois à venir.

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