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Ibuyers, marchands de bien 2.0

Ibuyers, marchands de bien 2.0

En France, ils se nomment Dili, Homeloop et Vendez-votre-Maison : ces nouveaux acteurs de l’immobilier ne se présentent plus comme des agences classiques, mais comme des entreprises de technologie et de données permettant de vendre un bien en un temps record. Le Loiret n’est pas encore le terrain de jeu privilégié de ces « disrupteurs », mais cela pourrait vite arriver…
Laurence Boléat
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Le principe est simple, et surprenant. Les ibuyers ne proposent pas votre bien à de futurs acquéreurs, mais achètent eux-mêmes votre maison ou votre appartement, entre 48 heures et quelques jours. Leur argument commercial clef est de jouer sur la vitesse de la transaction pour vous éviter l’anxiété liée à l’incertitude du délai, et les risques de rétractation d’un acheteur. Puis ils remettent le bien sur le marché, en espérant revendre, rapidement, avec une plus-value suffisante. Les ibuyers sont donc des interlocuteurs parfaits pour les vendeurs pressés, dont la famille s’agrandit, en instance de divorce, en mobilité professionnelle, ou tout simplement pour ceux qui veulent échapper aux multiples visites de clients, parfois simples curieux ou insolvables. La pratique est également intéressante lorsqu’on souhaite vendre en toute discrétion.

Dès lors, la première question qui vient à l’esprit concerne le prix : tout propriétaire peut légitimement penser qu’une transaction rapide et sans discussion entraîne une offre inférieure au prix du marché. À cela, Dili propose un tableau comparatif, qui liste un certain nombre de paramètres entre la vente par agence traditionnelle et l’ibuyer. Le nombre de visites, les délais de signature, la marge de négociation de l’acquéreur, la commission d’agence et les frais de service, les coûts de possession et de mise en valeur… : vous l’aurez compris, à la fin, la soustraction se révèle favorable à leur nouveau modèle de vente.

Deux milliards de découvert !

En réalité, le système de l’ibuyer existait déjà : c’est le principe du marchand de biens, qui connut une grande époque jusqu’à la fin des années 80. À la différence près que les marchands achètent généralement des immeubles entiers et revendent à la découpe, lot par lot. Les ibuyers, pour leur estimation, utilisent eux la force et la vitesse du numérique pour calculer les prix réels de vente au m², ville par ville, quartier par quartier. Car bien évidemment, proposer une offre d’achat avant visite nécessite des bases de données solides et alimentées, avec des filtres capables de faire des analyses très fines. C’est une des raisons pour lesquelles les trois enseignes que sont Dili, Homeloop et Vendez-votre-Maison n’ont pas – encore – de couverture nationale : en zone rurale ou périurbaine de villes de province de taille moyenne, évaluer un pavillon au juste prix est beaucoup plus compliqué qu’un appartement dans un quartier bien connu de Paris, Lyon ou Marseille. 

« Les ibuyers sont des interlocuteurs parfaits pour les vendeurs pressés » 

Pour autant, le modèle est juteux. Ainsi la start-up américaine Opendoor, créé en 2014, achète et vend aujourd’hui 6 000 maisons par mois aux États-Unis et a négocié 2 milliards de dollars de découvert ! En clair, tant qu’il ne dépasse pas cette somme faramineuse, le banquier ne l’appelle pas… Impressionnant, rapide, « ce système a provoqué un gros remue-ménage outre-Atlantique », affirme Vincent Lecamus, fondateur du site Immobilier 2.0. Cette entreprise a également entraîné d’autres acteurs puissants dans son sillage, obligeant la licorne à lever des fonds et à s’endetter. 

Le Loiret suivra-t-il ?

Le marché français, toujours friand des méthodes anglo-saxonnes de vente, a copié la grande sœur américaine dès 2017. Et une bonne partie de la réussite résidera dans le financement des opérations, gourmandes en liquidités. En clair, prouver aux banquiers et aux actionnaires que l’idée est peu risquée et rentable, afin de ne pas trop puiser dans ses fonds propres. 

À ce jour, le nombre de transactions sur le territoire français demeure très confidentiel, et pour cause : aucun des ibuyers étudiés ne travaille pour l’instant dans le Loiret, par exemple, ni sur l’ensemble des départements. Tous se concentrent sur les grandes villes françaises. Mais à l’avenir, la marque Dili, filiale du groupe immobilier Digit Re, lancée en mai 2018, pourrait se distinguer. Maison mère de Capifrance, Optimhome, Refleximmo et Immobilier neuf, elle ambitionne de s’appuyer sur la force de ses quatre réseaux de mandataires pour étendre son service à des dizaines de villes de province, avec l’intention clairement affichée d’accélérer la révolution numérique sur le segment des particuliers. 

« Malgré tout, le pourcentage de commissions et frais reste élevé, entre 7 et 12 % » 

Pour autant, pas sûr que la mayonnaise prenne : le pourcentage de commissions et frais reste élevé (entre 7 et 12 %), le délai de transaction est souvent plombé par le passage devant notaire – obligation française – et les irréductibles Gaulois possèdent un rapport à la pierre singulier, attribuant une valeur affective très forte à leur bien que le tout-digital pourrait heurter.

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