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« Il faut changer notre approche »

« Il faut changer notre approche »

Adjoint orléanais en charge de la culture depuis juillet dernier, William Chancerelle dresse quelques axes de son projet pour les six prochaines années (développement de la culture « de proximité », « métropolisation » de la Scène Nationale d’Orléans, arrêt du projet de cité musicale) et en appelle à une culture de proximité qui donne la part belle aux acteurs. 
Propos recueillis par Benjamin Vasset
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Serge Grouard a annoncé la semaine dernière, en conseil municipal, la fin du projet de cité musicale sur la tête nord du pont de l’Europe. Pourquoi ?

C’était un beau projet, mais qui coûtait extrêmement cher, entre 53 et 57 M€ HT. Or, la Métropole ne peut pas dépenser cette somme. Et les Orléanais étaient aussi vent debout sur le fait que le Conservatoire quittait ses murs historiques : pas pour des raisons de conservatisme, mais parce que lorsqu’on marche dans le centre-ville, on entend la musique et c’est plutôt agréable. Par contre aujourd’hui, le projet n’est pas de laisser l’Astrolabe tomber une fois de plus, mais de prendre le temps de réfléchir.

Vous dites que ce projet de cité musicale est trop cher, mais combien les études qui ont été lancées ont-elles déjà coûté ?

Je n’ai pas les chiffres en tête. Aujourd’hui, en tout cas, il y a deux options : soit nous arrêtons complètement le projet et nous engageons une procédure qui pourrait être coûteuse; soit nous réduisons la voilure en le faisant intelligemment avec les architectes et nous devrions trouver des terrains d’entente.

Pour l’année 2021, le budget Culture d’Orléans sera-t-il plus « costaud » que les années précédentes ?

Comme pour toutes les autres directions, il baissera de 1 %. Mais je vais présenter un plan de soutien pour la culture. Les arbitrages auront lieu dans 15 jours.

Vers quoi va aller ce plan ?

Je défends une culture de proximité, qui s’appuie sur les acteurs locaux, où les institutions seront un peu mieux articulées entre elles. Je veux qu’il y ait des appels à projet et à création, notamment dans les quartiers nord. L’argent, on va l’injecter dans de la culture « localo-locale ». Les structures n’auront pas forcément plus de sous, mais les associations auront peut-être plus de soutien. Je ne veux favoriser personne, j’ai envie que tout le monde soit aidé, sans pourtant arroser de subventions. L’idée, c’est d’être créatif ensemble. Je ne cherche pas à révolutionner la culture à Orléans, mais d’abord à comprendre où ça pèche.

Hors les Murs sera-t-il pérennisé ?

Oui, mais sous un format un peu différent. Faire des Hors les Murs tous les samedis dans le centre-ville, je ne suis pas sûr que ce soit pérenne. Je souhaite qu’on fasse de la culture avant de faire de l’événementiel. Jusqu’alors, je pense qu’on a un peu inversé les rôles. Hors les Murs doit donc être plus ciblé et pertinent. J’aimerais qu’il puisse s’implanter à l’Argonne, aux Blossières, à La Source, à Saint-Marceau et qu’il soit plus en lien avec des acteurs de ces quartiers-là.

Quel est votre projet pour le Théâtre d’Orléans et les différentes structures qui y « logent » ?

La situation est particulière. Tous les acteurs sont passionnants et ont leur place là où ils sont. Mais comment les articule-t-on ? On doit préserver les quatre, mais il faut être bien clair sur le rôle de chacun : le CDNO et le CCNO ont une vocation de création, pas de production, tandis que la Scène Nationale est un beau catalogue de spectacles. La Scène Nationale a une vocation un peu plus métropolitaine, et sa « métropolisation » peut être un facteur d’apaisement : si elle sort un peu des murs, nous pourrions faire comprendre que tout ne se situe pas au Théâtre d’Orléans.

Une communication conjointe ne serait-elle pas plus pertinente ?

Je ne pense pas, car chacun a sa vocation. Le CCNO a une très bonne comm’, avec beaucoup de personnalité. Il propose quelque chose que les Orléanais comprennent. C’est peut-être vers ça qu’il faut s’orienter : la Scène Nationale et le CDNO doivent sortir un peu de cette confusion dans l’esprit du public. À la première la production, à l’autre la création.

Quand va se dérouler le festival de jazz new look promis par Serge Grouard ?

J’ai envie de prendre le temps, car le contexte m’y contraint. Je me vois mal m’axer complètement sur le jazz : le message ne serait pas bon pour les différents acteurs musicaux. Je veux plutôt quelque chose qui réunisse les musiques. Le jazz aura toute sa place, c’est une volonté de Serge Grouard, il n’y a pas de problème là-dessus. Mais je voudrais n’oublier personne dans le monde de la musique.

« Faire de la culture avant de faire de l’événementiel »

En 2021, il y aurait donc un festival « multi-musical » ?

J’aimerais bien. Mais plus qu’un festival, je voudrais plutôt avoir « tout Orléans en musique » (sic). J’aimerais avoir un fil rouge toute l’année et si, une semaine par an, avec tous les acteurs, nous arrivions à mettre tout Orléans en musique, ça me plairait beaucoup. Il faut changer notre approche de la Culture subventionnée par les collectivités : on ne peut plus balancer des budgets pour faire des gros machins qui montrent les muscles. Il faut, au contraire, quelque chose d’enraciné dans les quartiers, qui irrigue la ville. À plaquer des gros événements, on ne crée pas une culture de la culture. Et c’est pour ça que les jeunes se barrent : ils n’ont pas l’impression d’être acteurs de leur ville.

Donc, le festival de jazz est enterré, ou non ?

Il n’est pas enterré. Mais je n’ai pas en tête le format.

Le Parlement des écrivaines, les Voix d’Orléans : vous maintenez ces événements ?

Il faut à Orléans un lieu ou un festival d’idées. Mais le format des Voix d’Orléans est lourd à mettre en place. Il n’a pas forcément trouvé son public, même s’il a sa place. Moi, mon obsession, c’est de travailler autour de la figure de la femme combattante, sous la forme d’un festival ou d’un moment de rencontre. On doit s’appuyer sur le Parlement pour amener des femmes à témoigner à Orléans.

Au fait, le Festival de Loire, c’est de la culture… ?

C’est de la culture à partir du moment où des gens se rencontrent, échangent, et sont amenés à connaître l’histoire de leur ville. Maintenant, le Festival de Loire ne doit plus être un festival qui dure dix jours tous les deux ans mais bien toute l’année, avec un point d’orgue dont les dates pourraient être changées. Il doit être un temps de création longue durée, comme c’était sa vocation en 2001. Et cela n’empêche pas qu’après, 400 000 personnes se réunissent sur une semaine et que cela sente un peu la saucisse. La Fête de l’Huma, ça sent la merguez et on ne se demande pas si c’est de la culture ou de l’événementiel… 

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